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Ce dimanche 9 juin auront lieu les élections européennes. Cependant, peu de jeunes électeurs seront au rendez-vous selon un rapport de la Fondation Jean-Jaurès. Un phénomène qui semble désormais s’ancrer dans la durée.

Illustrations des têtes de liste pour les élections européennes, France. Le 07/06/2024, par Jean-Marc Barrère / Hans Lucas

Les élections européennes sont un événement politique majeur pour les citoyens de l’Union européenne, qui ont la possibilité de choisir leurs représentants au Parlement européen. Cependant, à quelques jours du scrutin, les jeunes électeurs de moins de 35 ans semblent peu motivés pour se rendre aux urnes. Selon une estimation de l’Observatoire de l’Opinion à la Fondation Jean-Jaurès, le taux d’abstention chez les 18-24 ans devrait atteindre 66%, tandis que chez les 25-34 ans, il devrait s’élever à 69%. Ces chiffres sont particulièrement préoccupants, car ils suggèrent que les jeunes se désintéressent de la politique et de l’avenir de l’Union européenne.

Samuel, 22 ans, estime que la politique est fondée sur « beaucoup de mensonges » et se sent manipulé. Il ne s’intéresse pas aux élections européennes et a cessé de s’informer à ce sujet. « Il y a beaucoup d’anxiété dans la société, ce qu’il se passe à Gaza, en Ukraine… La politique alimente cette anxiété », explique-t-il. Un point de vue partagé par Chloé, 25 ans, pour qui le désintérêt pour la politique est total. Elle ne compte pas voter et affirme ne plus croire en la politique. « Je ne suis pas apolitique, mais je suis tellement déçue de ce que la politique est devenue. Comparé à l’époque de nos parents, c’est devenu du business, nous sommes dirigés par des influenceurs d’idées. » Un système devenu archaïque de son point de vue, « je n’y crois plus » souligne-t-elle.

 

Une désaffiliation plutôt qu’un désintérêt

Pour le sociologue Paolo Stuppia, spécialisé dans les mouvements sociaux et les étudiants, ce retrait est loin d’être anodin. La jeunesse se sent abandonnée et se tient à l’écart du domaine politique à cause de problématiques sociétales ancrées qui ne semblent pas prêtes d’être résolues. Il explique que « si les jeunes décident de ne pas aller voter, cela est lié à une vision pessimiste de l’avenir et à une perception d’être face à un horizon bouché. Il y a des préoccupations climatiques qui s’ancrent dans leur combat, mais ces derniers considèrent un manque de représentativité évident des élus ».

Cependant, certains jeunes restent impliqués dans la politique, à l’image d’Arbër, 34 ans. Bien que résident en Suisse depuis la fuite de sa famille lors de la guerre d’ex-Yougoslavie et ne pouvant pas voter dimanche, Arbër suit les actualités européennes de près. Son expérience de vie est au cœur de ses prises de position. « J’ai conscience de la puissance des politiques depuis que je suis en âge de comprendre. Ce sont eux qui prennent les décisions et il est important de montrer son accord comme son désaccord. Je ne veux pas que les futures générations vivent mon passé », affirme-t-il.

 

Une implication dans l’ombre d’un paradoxe

En 2022, suite aux élections présidentielles, la question de l’abstention des jeunes avait déjà été abordée sur France Inter. Marc Lazar, professeur d’Histoire et de sociologie politique à Sciences Po, et Olivier Galland, sociologue et directeur de recherche émérite au CNRS, avaient souligné l’existence d’une « jeunesse plurielle ». « Il y a un paradoxe. Les jeunes sont plutôt optimistes sur leur situation personnelle, mais très pessimistes sur l’avenir de la société », avaient-ils noté.

Aujourd’hui, une grande partie de la jeunesse ne place plus son espoir dans la politique afin d’assurer son avenir. Même si l’aspect sociologique prime dans l’intérêt que porte la jeunesse envers la politique, cette dernière semble désormais revendiquer ses idéologies à travers d’autres moyens tels que les mobilisations, les participations associatifs ou encore le boycott.

 

 

Daphnée Cataldo